La thonaille ou thonaïre et palamidière (ou pélamidière)

Bref historique

Technique de pêche ancestrale qui remonte assez loin dans le temps. Sachant que les premières madragues dateraient du VIIe siècle av JC, les thonailles, beaucoup moins complexes dans leur élaboration, pourraient très bien être aussi anciennes. A confirmer...
La pêche à la thonaille, à Morgiou, s'est arrêtée en février 1966 par manque d'équipage et diminution des prises.

Les postes de pêche et les équipages

Les postes de pêche étaient identifiés :
  1. La Baume Rousse
  2. La Rague
  3. Rillet
Des équipes étaient constituées :

Les postes et tours de pêches étaient attribués selon une convention très précise :  Il fallait «prendre sort»

Explications :

Une roche située dans l'éboulis de l'Aiguille servait de témoin. (Actuellement cette roche est masquée par une branche de pin)

Le premier bateau qui sortait du port, avec les filets à bord, et arrivait à cacher cette fameuse pierre par le versant de l'Aiguille était déclaré prioritaire pour le premier poste : La Baume Rousse. Le poste de la Rague était reservé au second et celui de Rillet pour le troisième.

Mais ce n'est pas tout, il fallait bien organiser les durées des tours afin que la pêche soit équitable, du moins en théorie, pour toutes le équipes.

Si vous êtes curieux, peut-être aurez-vous assez de courage pour affronter les explications suivantes :

La 1ère équipe «ayant pris sort» calait sa thonaille pour 2 nuits (lundi soir et mardi soir) au poste de la Baume Rousse, tandis que les équipes 2 et 3 calaient respectivement à la Rague et à Rillet.Les filets étaient donc levés le mercredi pour laisser le 1er poste à la 2ème équipe qui elle avait calé à la Rague. La troisième équipe qui avait donc calé à Rillet prenait le 2ème poste et la 1ère équipe se retrouvait donc à...si vous avez bien suivi la réponse est :  Rillet.

Les filets restent à poste à nouveau pour 2 nuits, et il faut tout déménager à nouveau selon la même séquence, pour caler le vendredi soir, mais là, les postes seront occupés pendant 3 nuits afin de recommencer la semaine comme précédemment. Et si vous voulez savoir quelle équipe occupera le 2ème poste le 3ème jeudi du mois on vous laisse le soin de le calculer, sachant qu'une équipe a perdu son tour, car, si une quatrième équipe, venue de l'extérieur, des Goudes par exemple, «prenait sort» c'est la troisième équipe qui devait laisser son tour... et, si le mauvais temps n'a pas permis de tirer les filets pendant quelques jours...ajoutez un peu de mémoire à votre ordi pour poursuivre les calculs...

Si vous avez tout compris, c'est que vous avez un Q.I. très élevé, bravo!

Composition du filet

Constitué en fil de coton d'une résistance de 80 kg environ, d'une maille de 24 mm de coté. Le haut était armé d'un «brime» de 5 auquel étaient attachés tous les 50 cms les «cascaillons» (des flotteurs de liège).
La hauteur de la nappe était de 110 à 130 mailles. Au bas du filet, à nouveau, un «brime» qui supportait les attaches des «baudes» (prononcez : "baoude" pierres d'environ 5 à 6 kgs) dont le rôle était de maintenir le filet à poste, même en cas de mauvais temps.

Période de pêche

La bonne période s'étalait du 15 août à mars, bien que l'on ait pu constaté la présence de thons tout au long de l'année mais en quantité réduite. Les thonailles et palamidières étaient, pendant toute cette période, prioritaires sur les «battudes» de poste (filets à mailles plus petites pour la capture des maquereaux, séveraux, dorades, sars etc..) utilisées le restant de l'année.

La calée

La thonaille, une fois armée, c'est-à-dire appareillée de tous ses «cascaillons», «baudes» et «brimes», était embarquée et menée à poste où elle était immergée avec une trajectoire perpendiculaire à la terre pour une longueur de 80 brasses, puis 20 brasses pour tourner en direction du port et 20 brasses vers le port soit au total 120 brasses.. Des signaux de toutes les couleurs indiquaient sa présence.

Les prises

Les filets étaient visités tous les jours,selon la technique de la «caisse vitrée» qui permettait de voir avec précision de la surface jusqu' à une vingtaine de mètres de profondeur et plus, après un fort mistral qui rend l'eau transparente. En approchant du poste, d'un simple coup d'oeil, la présence de poissons pouvait être estimée par les "cascaillons" qui ne présentaient pas une attitude habituelle, par exemple ils plongeaient sur quelques mètres.A l'aide de la «caisse vitrée» on avait alors confirmation. Selon l'endroit de la prise dans le filet un levage partiel suffisait à récupérer la ou les prises ; dans le cas de tirage, le recalage était immédiat sauf réparations importantes des mailles parfois déchirées par de grosses prises ou les requins ou dauphins.
A signaler une technique innovante et efficace mise au point par Roger Silvestri : après s'être arnaché d'une combinaison de plongée et du matériel qui allait avec, le démaillage du poisson sous l'eau était devenu d'une extrème simplicité, si bien que même le ramandage du filet, si nécessaire, pouvait être exécuté également en plongée. Gain de temps et d'efforts appréciables.

La commercialisation

Pas besoin d'intermédiaires. Les épouses ou filles de pêcheurs étaient des vendeuses hautement qualifiées et, la place de l'église de Mazargues, se trouvait naturellement un lieu stratégique pour y tenir leur étal, ainsi qu'en témoigne cette photo. A noter que le prix de vente du kilo de thon était de 400 F (F anciens bien sûr !).

Le prix de vente au kilo des autres produits :

Période antérieure à 1950.



  Copyright © calanquedemorgiou.fr